Soyez prudent cependant. Selon le politologue Pascal Perrineau, ces cris de joie ne peuvent être que des bruits sourds. “L’accord de la France Insoumise avec les Verts, qui ont remporté 5% à l’élection présidentielle, n’est pas vraiment historique. “Il faut voir la suite, car pour l’instant ce n’est qu’un accord partiel”, a déclaré l’expert en sociologie électorale. Même remarque du politologue Bruno Cautrès qui ne trouve rien de comparable aux précédents accords trouvés par la gauche, en 1997, par exemple, selon la gauche plurielle de Lionel Jospin. “Il faut attendre et voir quel est le but de cet accord”, a déclaré Bruno Cautrès. S’il doit envoyer un message aux électeurs de gauche qu’une nouvelle construction politique commence, cela a du sens, mais cela prendra du temps et plusieurs étapes. “Si l’idée est de former un accord électoral afin de minimiser les pertes de chacun, ce seront les élections législatives qui décideront et diront si cela a réussi ou non.”
“Sous une tente à oxygène”
Le côté inédit, selon Pascal Perrineau, réside avant tout dans la radicalité imposée par cet accord. « Historiquement, l’union de la gauche s’est toujours arrêtée au Parti communiste. “C’est la première fois dans l’histoire qu’il y a une alliance avec l’extrême gauche, la gauche de la gauche.” Et de souligner : “En cela, Jean-Luc Melanson peut être heureux car il atteint ses objectifs et s’impose comme un rassembleur, comme un compositeur de la gauche française, qui est dans une triste situation.” D’après les faibles scores des candidats Yannick Jadot, Fabien Roussel et Anne Hidalgo à la présidentielle, le bloc de gauche semble avoir enfin trouvé une place dans le débat… les mêmes qui avaient échoué pendant des mois. “Je pense qu’il y a beaucoup de panique au sein d’EELV et du PS”, estime Pascal Perrineau. Ils ont obtenu un score encore plus bas que prévu. Ils tentent de se mettre sous oxygène, celui de La France insoumise, qui risque pourtant de les noyer politiquement à terme. “Si ces accords sont conclus, nous assisterons à une énorme radicalisation de la gauche française, qui sera encore plus marginalisée.”
Un tiers des électeurs
Alors si ce premier accord avec EELV ouvre la voie à d’autres signatures à gauche, Pascal Perrineau reste prudent quant à leur poids politique aux législatives. “S’il y a un accord qui inclut le PS et le PC, quelque chose qui semble probable est un accord d’une famille politique, la gauche française, qui reste minoritaire. “Il suffit de prendre le premier tour des élections et de constater que leurs résultats réunis ne dépassent pas le tiers des électeurs”, analyse le politologue. Selon les deux politologues, les partis de gauche devraient aussi prévenir, en cas de victoire, de futurs désaccords gouvernementaux. “Il reste encore un long chemin à parcourir avant de pouvoir gouverner ensemble avec des éléments très importants de différenciation idéologique entre ces formations politiques”, souligne Bruno Cautrès. De son côté, Pascal Perrineau n’envisage aucun compromis entre les parties. “Comment fais-tu des compromis quand tu pèses 2% et que l’autre pèse 22% ? Ce n’est pas possible”, compare le politologue.
Et maintenant ?
Selon Pascal Perrineau, le Parti socialiste aurait plus à gagner en “gardant la vieille maison”, comme Léon Blum en 1920 lors de la chute de la SFIO. “Dans la catastrophe, les socialistes vendent ce qu’ils sont, c’est-à-dire remettent un gouvernement de gauche qui gouverne les grandes villes, les régions, les appartements. Il risque vraiment d’écraser ce qui reste du Parti socialiste. Et Bruno Cautrès d’ajouter : “La candidate à la présidentielle, Anne Hidalgo, vient de faire campagne pour sa retraite à 62 ans, pour l’engagement européen et l’Otan. Éliminer tout cela en très peu de temps montre qu’il manque des étapes pour que les électeurs puissent l’acheter en entier. “Au siège de La France Insoumise, dans le 10e arrondissement de Paris, les discussions se poursuivent ce lundi après-midi entre le PCF et le PS.