“Maintenant, il s’agit de ramener l’âge de la retraite à 65 ans ! (…) Ne l’oublie jamais, rien ne t’a été donné, tout a toujours été saisi ! “Le leader d’Insumi a commencé, la voix qui était couverte par la désapprobation n’a été causée que par la référence au plan de réforme du président nouvellement élu. A moins de deux mois des élections législatives, et seule l’éventualité d’un report de l’âge légal a fait l’objet, ce 1er mai, d’une véritable tension au sein de la marche.

Difficultés et enjeux écologiques

A tout juste 28 ans, Camille se dit “complètement inquiète” à ce sujet : “Quand on voit nos parents au chômage à 60 ans, on se demande forcément ce que ça veut dire de toujours vouloir repousser cet âge de la retraite.”. Ancienne chargée de production dans le secteur culturel, la jeune femme est aujourd’hui en formation pour devenir libraire. Favorable à la proposition de Jean-Luc Mélenchon qui voulait fixer la limite légale à 60 ans, la jeune femme poursuit : “Pour un cadre c’est évidemment possible de partir plus tard. Mais moi, si je deviens libraire, je ne sais pas si je pourrai encore ramasser des caisses pleines de livres jusqu’à 65 ans”. Pour Aurélie, 44 ans, et Vincent, 43 ans, la pénibilité de certains métiers doit assurément être mieux prise en compte par les pouvoirs publics en cas de réforme. “J’ai des collègues, des femmes qui sont laissées seules, qui sont obligées de continuer à travailler pour pouvoir vivre correctement. “Mais être enseignante à cet âge devient très difficile”, explique Aurélie, qui enseigne l’histoire-géographie dans un établissement de la banlieue parisienne. Son épouse appelle à une remise en cause globale de la notion de travail dans notre société : « Nous ne pouvons pas réformer efficacement le système de retraite si nous ne remettons pas en cause notre système productif actuel. “Nous devons prendre en compte les enjeux futurs, notamment écologiques, qui peuvent nécessiter moins de travail ou non.” Lucien, 31 ans, est écologiste. Membre d’une “convergence des luttes sociales et écologiques”, il juge l’aventure d’Emanuel Macron “absolument folle”. “Mettre le départ à 62 ans, comme cela se passe aujourd’hui, me semble déjà le maximum. “D’autant plus que le Conseil d’orientation des retraites (CoR) a indiqué que sans réforme, le système devrait être équilibré d’ici trente ans.” Dans son dernier rapport, l’agence recommandait cependant un départ à la retraite à 64 ans à partir de 2030 pour équilibrer structurellement le système “chaque année jusqu’en 2070”.

Supprimer les inégalités

Au-delà de cet âge légal, plusieurs manifestants ont réclamé un système de retraite “plus juste”, notamment pour les femmes. En effet, selon la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), les Français ont perçu en moyenne en 2018 un montant de retraite inférieur de 28 % à celui des hommes. Drapeau des révolutionnaires en main, Nadia, 65 ans, rêve d’une réforme capable d’effacer ces inégalités. “Les femmes sont moins payées que les hommes en moyenne tout au long de leur vie, elles sont plus touchées par les emplois précaires et les interruptions de carrière. “Même s’il y a compensation, ces inégalités devraient être mieux prises en compte.” Pour financer un système de retraite “plus juste”, Françoise, 57 ans, défend la création d’un impôt supplémentaire sur les plus riches : pour trouver de la richesse pour financer les prestations sociales”. Anxieux et troublés, ces manifestants auront-ils la possibilité de soumettre leurs revendications au gouvernement ? Lors de la campagne début avril, Emanuel Macron a déclaré que le référendum était un outil qui pouvait être “utilisé”, entre autres, pour réformer le système des retraites. Avant d’ajouter qu’il souhaitait “d’abord privilégier la large concertation politique avec les partenaires sociaux sur cette question”. Les discussions pourraient commencer dès cet été.